« L’urgence climatique reste dans l’angle mort de la plupart des Supply Chain » Éric Reinhard, MGCM Academy

MGCM Academy et Carbone 4 Académie lancent “Sustainable Supply Chain”, un parcours collaboratif sur 3 jours destiné aux décideurs de l’industrie. L’objectif : aborder les enjeux de décarbonation dans une approche systémique et passer les Supply Chain au filtre de l’urgence climatique. Éric Reinhard, formateur chez MGCM Academy, lève le voile sur ce parcours d’un nouveau genre.

23 octobre 2023

Lecture: 4 min

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**Pourquoi cette formation « Sustainable Supply Chain » vous paraît-elle essentielle en 2023 ?**

Elle est essentielle dans la mesure où dans un contexte d’instabilité qu’on n’a jamais connu, toutes les organisations doivent se remettre en question.

À ce titre il est troublant de consulter l’index de stabilité publié par KPMG et ASCM lequel montre que sur la période 2008/2018 les Supply Chain étaient dans un contexte relativement stable où très peu d’évènements venaient perturber les opérations. Or depuis 2018 nous avons une récurrence et une intensification des impacts liés notamment au réchauffement climatique. Il y a certes eu la pandémie et la guerre en Ukraine, mais on voit apparaître comme une sorte de fil rouge des risques climatiques, de façon récurrente, en tous points du globe. Avec des risques accrus dès lors que les Supply Chain sont mondialisées, avec de l’hyperspécialisation sur certains secteurs et zones géographiques. On constate un stress sur les organisations qui doit impérativement être adressé de manière systématique, complète et structurée.

L’urgence climatique est-elle dans l’angle mort des Supply Chain ?

Absolument. Nous sommes vraiment dans la tragédie des horizons, avec un focus sur le court terme que l’on retrouve sur les aspects finance mais aussi au niveau des Supply Chain, avec une planification – notamment des prévisions de vente – sur un horizon de 18 mois, guère plus loin. On reste surtout dominés par cette dictature des coûts, à la fois sur les stocks que l’on souhaite les plus bas possibles, et les achats de matières, composants et produits, que l’on achète au plus bas prix auprès de pays low-cost.

La conscience de l’importance du risque est là globalement, mais elle n’est pas toujours intégrée et certainement pas de manière systématique.

Aujourd’hui, anticiper le risque climatique, c’est bien sûr un enjeu vital pour l’humanité et pour les entreprises ?

Il y a une certaine logique puisque l’humanité forme une somme d’échelons avec les États, les entreprises, les organisations, les individus. Les individus sont mus par la volonté de continuer à vivre, les entreprises par l’impératif de se pérenniser. Or penser pérennisation, cela implique que des approches traditionnelles soit a minima questionnées, revues dans de nombreux cas. Avec à la clé un impact potentiellement considérable sur les transports, l’industrie, l’agriculture… autant de postes fortement émetteurs de GES (Gas à Effet de Serre).

Qu’espérez-vous procurer aux personnes qui viendront suivre la formation Sustainable Supply Chain ?

L’enjeu est d’offrir de la compréhension, de la guidance, de la structure, pour y voir plus clair. Le tout, c’est vraiment d’y voir clair ! En partageant les infos les plus pertinentes possibles pour bien comprendre les enjeux d’une part, et se placer dans une perspective d’action d’autre part. J’insiste sur la notion de partage qui sera au cœur de ce format résolument collaboratif, c’est absolument clé.

Les étés à plus de 40 degrés permettent déjà de mieux comprendre ce qui se passe, mais au-delà il s’agit de s’inscrire dans un temps plus long et de bien comprendre que nous sommes dans un monde aux ressources finies. Ces éléments-là doivent nous amener à repenser nos façons de gérer les opérations, sachant que dans la grande majorité des Supply Chain il y a des dépendances fortes par rapport à des zones géographiques qui sont exposées de façon différentes aux risques climatiques. Ces risques doivent être compris, cartographiés et modélisés afin que l’on soit en capacité de comprendre les enjeux et d’adapter les flux – flux d’information, flux physique et flux financiers – en conséquence.

Le niveau d’enjeu, la vulnérabilité et l’exposition des Supply Chain doivent ainsi être mis au premier plan. C’est ce que nous voulons réaliser, notamment pendant le J2, pour être en capacité de faire un état des lieux qui intègre les risques climatiques et qui permette de dégager certes les risques, mais aussi des opportunités !

La notion d’opportunité est-elle au cœur de la formation ?

C’est effectivement fondamental, l’idée étant que chaque participant puisse exposer à son équipe et à sa direction les risques et les transformer en opportunités. Cela impliquera peut-être de cesser certaines activités traditionnelles pour passer sur une autre logique, voire opérer un changement de paradigme qui se révèlera vital pour la pérennité de l’organisation.

Avez-vous un conseil pour les futurs participant(e)s ?

Prenez le temps de faire le point sur votre activité en amont de la formation et ayez l’esprit ouvert sur la possibilité d’intégrer de nouvelles approches, de nouvelles techniques, de nouveaux repères… et qui sait, peut-être, une nouvelle manière d’aborder votre métier ?

La formation mettra certes l’accent sur les horizons moyen et long terme, mais aussi court terme, en référence à la notion d’urgence climatique ?

La concrétisation des actions doit effectivement se faire rapidement, puisque plus on attend, plus on subit. Or rappelons-le, l’urgence climatique n’est pas juste une question de pérennité pour les entreprises, c’est avant tout un enjeu de survie pour le vivant dont nous sommes. L’idée est donc de subir le moins possible et d’enclencher un processus vertueux de décarbonation, en ayant une compréhension fine de son empreinte carbone dans une approche systémique, « end to end » qui intègre les partenaires en amont et en aval.

Pourquoi avoir créé cette formation avec Carbone 4 Académie ?

C’est une grande chance d’avoir pu cocréer cette formation avec la Carbone 4 Académie. Leur expertise sur les enjeux climatiques associée à notre expertise Supply Chain a permis l’élaboration d’un parcours extrêmement riche et robuste.

Ce partenariat s’est imposé assez naturellement dans la mesure où Carbone 4 est le cabinet pionnier en France sur les enjeux de décarbonation et de biodiversité. Ses fondateurs, en particulier Jean Marc Jancovici, exploitent et vulgarisent depuis des années la somme de milliers de travaux scientifiques synthétisés par le GIEC. Leur vraie valeur ajoutée étant d’avoir cette capacité de traduire de façon relativement simple, accessible et adaptée toute cette masse de rapports scientifiques dont les conclusions sont à la fois vertigineuses et implacables.